Inconfortablement installés au fond d'un siège de bus, nous entamons pour quelques 600 kilomètres une longue transversale de bitume reliant le Pacifique à l'Atlantique. Voilà 8 mois que les Andes nous accompagnent dans notre avancée, il est maintenant temps de leurs faire nos adieux ou tout du moins nous l'espérons « un au revoir » Il est incontestable maintenant que c'est en évoluant au sein de ce relief, en suant à grosses gouttes dans les cols les plus hauts que nous étions au paroxysme du plaisir cycliste !
Les paysages défilent à 90 km/h par notre petite fenêtre, près de 8 heures de pampa nous attendent. Le néant, paysage pelé sans aucun relief, étendue grisâtre à perte de vue, même le fameux « cordero » de Patagonie ne se laisse pas apercevoir dans cette immensité de rien.
Les genoux habitués au mouvement peinent à trouver leur place coincés entre deux rangées de sièges et pourtant nous ne sommes qu'aux premières heures de cette longue remontée vers Buenos Aires. Coihaique – Comodoro, 8 heures de bus ou plus exactement 6 heures et deux heures de passage de frontière laborieux. De là nous entamerons un trajet de 26 heures pour rejoindre la capitale Argentine.
Décidément l'unique source de stress depuis 8 mois vient de notre recours au transport motorisé. C'est systématiquement l'origine d'une boule au ventre qui nous accompagne. La tâche n'est jamais simple, si Tancar est une star incontestée et incontestable quand il foule le bitume, il devient un casse-tête sur roues dès qu'il s'agit de se faufiler dans une soute. Les règles des compagnies diffèrent au même titre que le format des bus : vélo encartonné, désassemblé sans pédales... bus avec galerie, deux étages, petites soutes ... Bref, tant que le pino et nous même ne sommes pas installés dans le « collectivo » la sérénité ne nous gagnera pas !
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
Notre arrivée à Comodoro est prévue pour une heure du matin, nous anticipons déjà une courte nuit dans la gare routière; le temps si nécessaire de démembrer encore un peu plus notre monture pour se plier au désir d'une compagnie de bus plus tatillonne. Minuit les paupières lourdes et les membres engourdis notre voisine de bus se retourne : « Hey ! Vous avez un hôtel à Comodoro ? » - « Non! Nous envisageons de passer les quelques heures avant le lever du jour à la gare ! » - « Cela peut être dangereux pour des étrangers ! Venez vous reposer à la maison! ». Stéphanie et moi nous concertons du regard, « vendu!». Encore un peu endormi, nous ne réalisons pas que c'est l'une des plus belles rencontres de ce voyage qui vient de naître ...
Martin, le compagnon de Magda au physique de repris de justice, 1m95, crâne rasé et tatouage en tout genre, nous attend à la sortie du bus; sa poignée de main est à l'image de sa corpulence! « Aie! ». Voilà un mois que Magda d'origine chilienne est en vacances dans sa région natale, un petit paradis de verdure le long de la « carretera austral », à quelques kilomètres de Puerto Tranquilo (pour mémoire à coté du glacier « exploradores », cf précédent article). Ses enfants, Mickaela et Santiago ont également profité de cette escapade pendant quatre semaines. Tombant de sommeil à plus d'une heure du matin, nous chargeons le pick-up de notre lourde cargaison. La petite famille nous ouvre les portes d'une « cabana », nous sommes prêts à rejoindre les bras de morphée; c'est sans compter le casse-croûte improvisé par Martin. Pendant encore une heure nous partagerons l'intimité de ces retrouvailles familiales nous efforçant de garder les yeux ouverts, nous tâcherons de satisfaire la sincère curiosité de nos hôtes.
Au réveil et comme promis, en dépit de la courte nuit M&M (Martin& Magda!) nous accompagneront à la gare de bus. Magda servira d'entremetteuse avec les nombreuses compagnies de bus. Déception ! Il nous faudra encore attendre la fin de la journée pour qu'un bus accepte notre chargement et encore nous faudra-t-il emballer Tancar plus convenablement. Si nous sommes désappointés sur l'instant, Martin est tout sourire: « Connaissez vous l' « asado de cordero de patagonie » - « Non! Et bien ce midi nous vous ferons découvrir ce joyaux de la gastronomie argentine ». La pièce de viande est impressionnante, un demi mouton et nous ne sommes que six!
Que de générosité se dégage de ce repas, l'espace de 36 heures nous nous sentirons comme chez nous, mais chez eux. Une gentillesse gratuite, une écoute sincère se dégage de ces moments. Nous découvrons un peu plus le quotidien de cette famille représentative d'une classe moyenne argentine. Magda est professeur des écoles, Martin est chauffeur poids lourds pour une compagnie pétrolière (omniprésente dans la région). Ils nous feront part de leurs projets communs, s'installer en Patagonie Chilienne et ouvrir quelques « cabanas » aux touristes; également peut-être un jour découvrir la France. - « Découvrir la France a toujours été un rêve, ... c'est maintenant un objectif ». Vivant avec un peu plus de1200 €/mois pour quatre personnes M&M respirent la joie de vivre. Loin d'être riches, ils ne manquent de rien. Tout le confort moderne est à leur portée, leur petite maison n'a rien à envier au petit pavillon de notre banlieue parisienne... L'écart de niveau de vie ne se ressentira que sur la capacité à voyager à l'étranger; en Amérique du nord ou en Europe notamment.
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
Tout à une fin et Eduardo nous attend déjà à Buenos Aires. Après un encartonnage digne de celui exigé pour un vol international, nous rejoignons notre bus « semi-cama » (bien assis mais mal allongé). Quelques échanges de Martin avec le chef de gré et immédiatement nous serons reçus comme des VIP par le personnel de bord en dépit de notre imposant chargement. Le surplus financier normalement exigible n'a maintenant plus lieu d'être. Tout est subitement d'une simplicité enfantine. La boule au ventre n'est plus, nous rejoindrons la capitale, le coeur léger et la tête pleine de souvenir.
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
Madrid, Lima, La Paz, Santiago, Buenos Aires, découvrir une capitale c'est toujours aborder une nouvelle facette d'un pays. L'argentine nous plonge alors dans une fourmillement de vie à travers Buenos Aires, une ville de la taille de notre éventuel grand Paris. Artères de plusieurs kilomètres organisées en damier. Si notre capitale française se laisse aisément découvrir à pieds, il en est tout autrement de son homologue outre atlantique. Buenos Aires a pourtant cette réputation de capitale la plus européenne d'Amérique Latine. La puissance culturelle qui se dégage de cette citée y est sans doute pour quelque chose. Et je ne pense pas uniquement aux vestiges architecturaux d'influence espagnole. La culture se respire dans les rues , musique omniprésente dont l'inévitable tango, les librairies fleurissent comme les banques à Paris. Buenos Aires m'a personnellement marqué par le fait que la vie ne soit pas cantonnée à un ou des quartiers. Chaque artère ou regroupement de blocs fourmille d'activités. Il est rare de parcourir une rue dans laquelle il n'y a pas un commerce. Enfin et surtout malgré les températures frôlant les 35°, les « Portenos » vivent dehors. Les restaurants quoique prolifiques affichent complets. Les trottoirs sont bondés et les taxis s'utilisent comme des « vélib ».
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
Eduardo, ami avant tout mais accessoirement argentin résidant à Paris, nous fera le plaisir (cependant trop court !) de nous faire découvrir quelques bribes de cette culture propre aux « gens au port »; Un parcours de 24 heures allant de la « Cathédrale » repère underground où les danseurs de Tango s'animent sur fond de vanités, au petit resto de quartier offrant la meilleur pièce de viande que nos papilles n'ont jamais eu l'occasion de titiller en 27 ans.
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
C'est grâce à l'accueil du père d'Eduardo que nous aurons l'occasion de profiter une bonne semaine de la capitale, entre un jeu de pistes à la recherche des pneus Schwalbe laissés chez la belle soeur de « Corinne et Philippe (velomonde.fr - Merci les amis!), une lessive intégrale du contenu de nos sacoches et un renouvellement en règle de nos sous-vêtements (Waouww!)
L'Uruguay fait partie de ces pays qui n'offre pas pour les Européens que nous sommes, d'images préconçues, pas de clichés mystiques qui viennent encombrer la mémoire - point de déception en perspective quand on s'élance sur les routes- C'est par l'estuaire que nous rejoindrons le pays le plus riche d'Amérique du Sud. Une transition maritime entre l'effervescence de Buenos Aires et le calme presque désuet de la petite bourgade de Colonia. Les platanes dominent les rues pavées, les basses petites maisons coloniales donnent un charme tout particulier à ce petit port. En nous évitant les sorties toujours laborieuses de capitales, nous découvrant aisément un pays que tous qualifient de « tranquilo »...
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
En dépit d'une chaleur à la limite du supportable, nous nous réjouissons de voir les kilomètres défiler sur le compteur. Qu'il est bon d'entendre à nouveau le pneu neuf chanter sur l'asphalte. Ce ronronnement significatif, synonyme de la santé à nouveau retrouvée de notre cher Tancar. En quatre jours nous avalerons près de 350 kilomètres, paysages vallonnés, immensité de verdure, un petit air de France parfois, plantations céréalières, platanes en bord de route... Bref nous sommes de retour à la maison. Quatre jours où nous retrouvons nos réflexes à la Antoine de Maximi, « j'irai planter ma tente chez vous ». Une école, un jardin de particulier, une station service tels sont les sites de prédilection pour nos bivouacs.
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
35O kilomètres, deux misérables millimètres sur google earth, une bien courte distance à l'échelle des 8874 kilomètres qu'affiche notre GPS (kilomètres uniquement parcourus à vélo – je précise -) et pourtant il nous faudra plus de 21 heures, 1260 minutes les fesses posées sur un triangle de cuir me concernant, sur une toile de transat pour Steph (ah, vivement le vélo couché !) . L'imaginaire du cyclo en devenir est définitivement très riche. Avant notre départ, je me projetais dans ces longs moments qu'offriraient les heures de pédalages, celles-ci seraient alors un merveilleux prétexte à l'évasion cérébrale, à la réflexion profonde et métaphysique du sens de la vie! Tout un programme. Que neni, semble t-il que notre cerveau ne soit pas programmé pour cet état de conscience quand les jambes s'attachent à conserver une parfaite cadence de pédalage. Il arrive néanmoins que nous nous plongions dans un état qu'à mon sens, seuls les sports d'endurance peuvent apporter. Lancé dans une journée à kilomètres, je me laisse parfois emporter entre deux mondes, les jambes sont en position automatique, les bras conduisent Tancar par réflexe. L'esprit est ailleurs, flottant au dessus du macadam plongé dans les souvenirs et dans l'avenir. Cet état est en général propice à l'éclosion de nouvelles idées, formules que notre blog pourrait accueillir. Quel plaisir que de se laisser voguer dans ce dialogue intérieur qui a le pouvoir de supprimer toute notion de distance et de temps. Le compteur défile en notre absence. Il est cependant malheureux de constater que cette conversation auto-centrée évolue dans des strates bien éloignées de celles de la mémoire. On se souvient donc d'avoir trouvé une tournure de phrase exceptionnelle qui ferait fureur sur le blog... mais il n'en ressort rien de plus !
Nous profitons également de ces longues heures passées sur Tancar à écouter les « podcasts » France Culture. Aurélien H. que je dois remercier aujourd'hui publiquement, m'a transmis avant notre départ, quelques centaines d'heure d'émissions en tous genres : chroniques quotidiennes, magazine économique, de société ... Nos préférences se sont tournées à ce jour, sur trois programmes : « Les pieds sur Terre », « Sur les docks », « L'esprit Public ». Les deux premiers abordent assez légèrement des thèmes de société éclectiques à travers un format de 25 et 50 minutes. Le ton se rapproche de celui de « Streap Tease » (magazine France 3). « L'esprit Public » s'attache lui à décortiquer l'actualité politique économique, sociétale de la semaine précédente. Il s'agit du type de programme à vous donner des complexes, les intervenants (Max Gallo, Jean Louis Boulange, Philippe Meyer ...) parlent comme des bouquins des sujets les plus pointus. Les nombreuses références historiques facilitent notre compréhension des sujets abordés. L'approche parfois austère nous impose une concentration maximale; le résultat encore une fois sera de nous déconnecter de l'espace temps. La clé pour ne pas voir défiler les kilomètres.
Nous n'avons tout de même pas choisi le tandem pour ne pas profiter de cette proximité. Une grande partie de ces longues minutes, nous discutons. Bien entendu, nous évoquons nos amis et familles laissés en France. Nous débattons à chaud de notre expérience, de nos dernières rencontres et de manière générale de l'immense chance que nous avons de vivre ces moments. L'un de nos jeux favoris, qui là aussi est chronophage, est de prendre un pays et d'essayer de se remémorer tous les lieux de bivouac y affairant. « Espagne : « ah oui ! Le campement dans une clairière, en haut d'une bute... Mais si, rappelle toi, on a dû pousser Tancar à travers des vignes et tu m'a engueulée !!? » Enfin, vous voyez l'esprit ! Cet exercice de mémoire s'avère particulièrement difficile et seules quelques images fixes restent profondément ancrées.(A ce sujet, nous tenons toujours notre rubrique quotidienne. Elle fera l'objet d'une remise jour en France ... le retard accumulé étant trop important).
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
Paysandu, sur les conseils d'un cycliste uruguayen nous traversons la frontière pour l'Argentine afin de poursuivre notre remontée vers le nord. Nous sommes attendus début mars, à Iguazu par deux amis français -1200kms à abattre - sans compter une halte inévitable au nord de Posadas pour découvrir les missions jésuites. Connaissez vous le « camion stop »? Pratique nécessaire pour toute personne chargée d'un Tandem voulant effectuer une longue distance. Quartier général, une station service miteuse, perdue le long de l'unique route filant vers le nord. Stéphanie gagnera largement ses gallons de rabatteuse! Rien à dire et Dieu sait pourquoi, elle a beaucoup plus de succès que moi pour arrêter un camion lancé à 90kms/h. La tâche n'est pas simple pour autant avec un vélo chargé de 50kgs. Il nous faudra plusieurs heures pour prendre un premier camion qui nous accompagnera sur 300kms. Une nuit et quelques heures plus tard un nouveau relais nous déposera à 50kms de Posadas. Cette expérience de « camion stop » encore inédite depuis notre départ est l'occasion encore une fois de partager le quotidien des locaux, longues heures de discussions bercées par le ronronnement du puissant moteur.
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
15H et malgré plus de 35° à l'ombre, nous enfourchons Tancar pour les 50kms nous séparant de Posadas. Nous retrouvons le charme des villes du nord de l'Argentine, les vestiges coloniaux se marient avec les ensembles plus modernes. La chape de plomb pesant sur la ville donne une atmosphère presque endormie à la pourtant charmante « Plaza del arma ».
De 21. 2 Fevrier - 22 Fevrier |
Nous pensons bien à vous,
Félix
PS: Nous serons de retour le 11 mai sur Paris pour un petit mois-> à vos agendas
PS 1: Constantin (cf: dernier commentaire) Un petit indice stp !!!???? (12 / 2013 ?)
Holla AMicos franceses de la bici. Tu blog sta mui copado... Felecitacion Tiene mas o menos 10 dias que nos encontramos in Puerto Rico, de bici. Para mi falta solo 6 dias para llegar a Buenos Aires e efinar mi viaje. Depues Yo volvo a mis classes Au revoir.
salut les globetandemistes, heureux de vous voir en argentine après votre passage au Chili. les derniers évènements sismiques nous rappellent qu'un tour du monde reste une aventure très engagée !! bonne continuation et continuer à nous faire rêver...
A quand les vélos pliants,pour remédier aux exigences du transport motorisé?.... Culture physique et intellectuelle,quel beau programme et qui n'est pas que chronophage.Vous allez nous revenir encore plus beaux!Quand votre "esprit se plonge dans l'avenir"certains aimeraient bien savoir,devinez qui... Bises à vous deux.
Hiiiiiii je prends un mois de vacances alors c'est parti!!! Bon ptete pas mais au moins ca sera periode we off pour etre la pour vous ;-) bon allez je lis larticle maintenant, j ai triché chui allée direct en bas la bise
Hiiiiiii je prends un mois de vacances alors c'est parti!!! Bon ptete pas mais au moins ca sera periode we off pour etre la pour vous ;-) bon allez je lis larticle maintenant, j ai triché chui allée direct en bas la bise
Merci pour ce dernier blog, un peu de soleil et le moral remonte. Même si nous sommes privilégiés par vos liaisons sur skype, votre blog nous apporte une vision différente avec d'autres anecdotes. Pour notre plus grande joie continuez.